Il y a deux ans, une entreprise spécialisée dans les plateformes de force en kinésithérapie m’a contacté pour promouvoir ses produits auprès des kinésithérapeutes. Cette société, très présente sur Facebook via des publicités ciblées, souhaitait mettre en avant ses outils de rééducation connectée. Finalement, la collaboration n’a pas vu le jour. Pourquoi ? Parce que je reste sceptique quant à la réelle utilité de ces technologies. Voici pourquoi.

Le piège du high-tech en kinésithérapie

De nombreux kinés sont attirés par les appareils high-tech. Le monitoring digital donne une impression de rigueur scientifique. Les chiffres, les courbes, les interfaces modernes rassurent… mais cette façade scientifique est trompeuse. Ce n’est pas parce qu’on mesure quelque chose qu’on le fait bien.

Utiliser des capteurs de force ou des plateformes numériques ne garantit en rien l’efficacité d’une prise en charge. Encore faut-il mesurer les bons paramètres, les interpréter correctement et proposer un traitement adapté.

Plateformes de force : la promesse séduisante de responsabiliser le patient

L’un des arguments majeurs en faveur de ces outils est la responsabilisation du patient. Grâce aux applications et aux capteurs, le patient peut suivre ses progrès en temps réel : force, équilibre, régularité… Cela lui donne un rôle actif dans sa guérison, ce qui est, en théorie, une excellente chose.

Mais en pratique, cela ne fonctionne pas toujours. Les études montrent que les patients non sportifs ou peu motivés peinent à réaliser leurs exercices seuls à la maison. Même avec une app, la motivation est difficile à maintenir, surtout lorsqu’il s’agit d’exercices de rééducation complexes et parfois douloureux.

Des résultats mitigés pour la thérapie digitale

Autre limite : le taux d’engagement des patients. Seulement 7 % des applications santé dépassent les 50 000 utilisateurs actifs. C’est très faible. Et pour cause : les patients oublient souvent les consignes, les positions, les corrections essentielles.

Résultat : l’exercice n’est pas fait correctement, et son efficacité est largement réduite par rapport à une séance en présentiel où le kiné peut corriger en temps réel.

Une mesure quantitative, mais peu qualitative

Les plateformes de force mesurent l’évolution de la force, mais pas la qualité du mouvement. Or, en rééducation, la manière d’effectuer un exercice est capitale.

Prenons un exemple : lors d’un mouvement de poussée, quels muscles sont réellement recrutés ? Pectoraux, deltoïdes, triceps, serratus antérieur ? La plateforme ne peut pas le dire. Seul un professionnel présent peut le vérifier, en observant ou en palpant.

Ce feed-back qualitatif, essentiel en thérapie, est tout simplement absent.

Plateformes de force : Une utilité limitée en cabinet

Certes, ces appareils permettent de mesurer précisément la force produite. Mais dans 99 % des cas, un testing manuel, une machine de musculation ou des élastiques suffisent.

Ces outils high-tech génèrent de jolies courbes, parfaites pour une étude clinique sur 50 patients, mais sont-elles vraiment nécessaires pour un seul patient ? Leur seul vrai avantage ? Booster la motivation en montrant des progrès, même minimes. Est-ce que cela justifie un investissement de plusieurs milliers d’euros ? À chacun de juger.

La difficulté d’isoler un muscle en pratique

Autre problème : il est souvent difficile d’isoler un muscle spécifique sans matériel très spécialisé, comme les machines de la marque David. Ces équipements sont rares et coûteux.

En plus, la douleur (aiguë ou chronique) peut inhiber l’effort, faussant les mesures. Dans le cas de lombalgies chroniques ou d’arthrose, les résultats sont donc peu fiables.

Un intérêt pour évaluer la posture ? Oui, mais…

Les plateformes de force peuvent détecter un déséquilibre entre les jambes, par exemple lors d’un saut ou d’un deadlift. Intéressant… mais on peut obtenir la même information avec deux balances à 30 € ou en observant les compensations visuelles lors du mouvement.

Les tests fonctionnels (rattrapés de bâton, simulations de chute, exercices d’équilibre) sont souvent plus pertinents et plus accessibles.

Un vrai intérêt dans certains cas posturaux

Soyons clairs : je ne suis pas anti-tech. Dans certains cas, la technologie apporte une vraie valeur ajoutée. Par exemple, certaines études montrent qu’un trauma peut modifier les oscillations posturales. Là, les plateformes peuvent détecter des micro-variations difficiles à percevoir autrement.

Des outils bien plus intéressants existent

À mon sens, certains outils high-tech sont beaucoup plus utiles :

  • Les lampes de réactivité, pour travailler la coordination et les réflexes.
  • L’analyse 3D du mouvement, via des capteurs, pour comprendre un geste sportif ou le mécanisme d’un lumbago.
  • Les systèmes interactifs ludiques, engageants pour le patient.

En comparaison, les plateformes de force offrent un feed-back trop pauvre et trop limité pour orienter efficacement une rééducation de qualité.

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Catégories : PostureSport

2 commentaires

Jean · 18/09/2023 à 16:20

Super! Merci !

    KineForce · 25/10/2023 à 15:40

    Avec plaisir !

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